La salle de lecture des Archives de Rennes sera fermée ce mercredi 1er mai 2024. Cliquez ici pour retrouver nos jours et horaires d'ouverture.

Archives au féminin

Histoire(s) de femmes

Archives au féminin de 1450 à 2021

Les Archives de Rennes conservent plus de 11 kilomètres d'archives du XVe siècle à nos jours. Dans cette masse de documents se cache une multitude de destins individuels et collectifs qui ont contribué au dynamisme et la richesse de l'histoire et du territoire rennais. Mais "où sont les femmes" ? Quelles traces les archives conservent-elles de leur présence, de leurs actions ?

Alimentée au gré des classements et des recherches effectués dans les fonds, cette frise chronologique évolutive a pour objectif de rendre visibles la présence et le rôle des femmes à Rennes du XVe au XXIe siècle.
 
Vous souhaitez contribuer à cette frise ? Proposez-nous un document des Archives de Rennes via ce formulaire de contact. Merci !





La jeune Anne de Bretagne demande le soutien de la communauté de ville de Rennes

Archives au féminin en 1488

Lire la transcription.

La bataille de Saint-Aubin-du-Cormier (28 juillet 1488) et le traité du Verger (19 août 1488) qui s’en est suivi ont mis fin aux rêves d’indépendance de la Bretagne. Le duc François II meurt le 9 septembre. Une semaine après le décès de son père, Anne se trouve à Guérande où la cour ducale s’est retirée pour éviter une épidémie qui sévit à Nantes. Elle est alors âgée de onze ans et écrit en ces termes à la communauté de ville de Rennes.

Ce billet est le témoignage du désarroi d’une fillette promue duchesse d’une province aux abois, et convoitée par de nombreux prétendants. Malgré la recherche d’alliances hors de France (son mariage avec Maximilien de Habsbourg en 1490), le destin d’Anne de Bretagne est déjà scellé en 1488 : le 6 décembre 1491, elle épousera à Langeais Charles VIII, roi de France. Après son veuvage, elle se remariera avec Louis XII en 1499, à Nantes. Ses efforts à cette occasion pour maintenir l’indépendance du duché ne feront que retarder le rattachement de celui-ci à la couronne : en 1532, la Bretagne est définitivement incluse dans le royaume de France.


Jehenne Pihourt choisie pour participer au cérémonial d'entrée de la reine Anne

Archives au féminin en 1505

Lire la transcription.

De juillet à septembre 1505, Anne de Bretagne entreprend un voyage à travers son duché. Mais, sur le chemin du retour, son passage à Rennes prévu au mois d'août et attendu avec enthousiasme par les édiles municipaux, est annulé au dernier moment, la ville étant touchée par une épidémie.

Dès juillet pourtant, Jacques Guibé, le capitaine de Rennes, avait pris l’initiative de convoquer les officiers et les plus importants bourgeois pour "deliberer du fait et police de lad[ite] ville et cité, et de ce que a esté proposé [...] de faire pour la tres joieuse et tres desirée venue et arrivée de la Royne et duchesse, nostre souveraine damme et princesse naturelle, qu’on espoire de brief estre en ceste sa ville."

Moment festif et rituel, l'entrée solennelle joue, derrière sa fonction de divertissement, un réel rôle politique. Elle est le théâtre éphémère du rapport de force entre élites urbaine et religieuse, entre communauté de ville et autorité ducale ou royale. Entrée, procession, cérémonie religieuse, fêtes chevaleresques ou représentations théâtrales, tout était prévu. La jeune Jehenne Pihourt (on parle de pucelle pour désigner alors une jeune fille), avait certainement été choisie pour participer à un tableau vivant représentant une scène religieuse.


Sur les traces de Louise de Quengo, femme noble du XVIIe siècle

Archives au féminin en 1656

Lire la transcription.

Ce document est l'acte de sépulture de Louise de Quengo, noble du XVIIe siècle,veuve de Toussaint de Perrien, chevalier de Brefeillac, décédée à l'âge de soixante ans au couvent des Jacobins, où elle s'était retirée.

Le corps de Louise de Quengo a été découvert au printemps 2014 dans un cercueil de plomb lors des fouilles préventives réalisées par l'INRAP pour la construction du centre des congrès (place Sainte-Anne). Elle avait été inhumée dans la chapelle Saint-Joseph de l'ancien couvent des Jacobins. Un reliquaire avec le cœur de son mari a été retrouvé dans son sarcophage ; son cœur à elle a été prélevé et se trouve vraisemblablement dans le cercueil de son mari.

Cette découverte est remarquable à double titre : le cercueil en plomb n'avait pas été pillé ni fondu à la Révolution et le corps ainsi que les vêtements étaient dans un état de conservation exceptionnel, ce qui a constitué une occasion unique de mener une étude anthropologique et vestimentaire complète. Les vêtements que portait Louise de Quengo sont aujourd'hui conservés au musée de Bretagne.

Pour en savoir plus sur cette découverte, consultez la page dédiée sur le site de l'INRAP et sur le blog du musée de Bretagne.


Mademoiselle de Murinet, logée avec le duc et la duchesse de Chaulnes

Archives au féminin en 1676

Lire la transcription.

Fils d'Honoré d'Albert d'Ailly, premier duc de Chaulnes, et de Charlotte Eugénie d'Ailly, Charles d’Albert d’Ailly est issu de la maison d'Albert de Luynes. Il devient duc de Chaulnes en 1653 et épouse Elisabeth Le Féron le 11 avril 1655. Gouverneur de Bretagne de 1670 à 1695, il est connu pour avoir violemment réprimé la révolte du Papier timbré en 1675 avec l'aide des troupes royales.

Cet extrait est un état des dépenses réalisées par la communauté de ville pour le logement du gouverneur de Bretagne et de sa femme, de passage à Rennes en juin 1676. Il n'est pas fait mention du lieu de résidence loué pour l'occasion mais il est probable qu'il s'agisse de l'hôtel de Brilhac, 13 rue des Dames. À cette occasion, le "manoir" est aménagé pour en améliorer le confort, la décoration et le protéger des "chaleurs […] extrêmement grandes dans le commensement du mois de juin". Il est également fait mention de l'aménagement de la chambre de mademoiselle de Murinet et de sa "demoiselle" de chambre.


Jeanne Budes fonde les "Dames Budes"

Archives au féminin de 1676 à 1678

Accéder au document dans son intégralité

Selon Emmanuelle Daniellou, Rennes "est bien dotée en maisons religieuses et les lieux de pensionnats pour les jeunes filles ne manquent pas sous l’Ancien Régime" (Abbaye royale des Bénédictines de Saint-Georges, communauté de Calvairiennes, Carmélites, Dominicaines, Ursulines etc.). " Toutes ces communautés ont accueilli des jeunes filles pour leur éducation. […] Il existait également des classes d’externes tenues par des religieuses ou des femmes pieuses réunies en sociétés et proposant un enseignement charitable."

C'est le cas de la communauté des "Dames Budes", tenue par des sœurs séculières, créée en 1676 et approuvée par lettres patentes de Louis XIV en 1678.

Jeanne Brandin, devenue Jeanne Budes par son mariage avec Jean de Budes, conseiller au Parlement de Bretagne, devient veuve très jeune. Elle confie alors l'éducation de sa fille, Anne-Marie Budes de Guébriant, au couvent de la Visitation, dès l'âge de 5 ans.

Arrivée en âge de se marier, Anne-Marie tombe gravement malade et meurt en 1674 à l'âge de 23 ans, juste après avoir prononcé ses vœux. Sa mère se consacre alors, conformément au testament de sa fille, à l’établissement de la communauté des "Filles de la Sainte-Vierge" ou "Dames Budes."

Ce document, en date du 16 septembre 1676, est un accord passé entre la communauté de ville et Jeanne Budes, en présence du notaire Jehan Prigent. Il stipule que Jeanne Budes s'engage à donner la somme de 14 000 livres à la communauté de ville pour contribuer à l'établissement d'un hôpital général dans cette ville de Rennes", ainsi qu'à "l'établissement perpétuel d'une communauté […] de filles […] et veuves sécullières en forme de séminaire, indépendant dudit hôpital général ou autre lieux, pour l'instruction des pauvres demoiselles et autres filles de famille."

Les sieurs et députés de la ville consentent, quant à eux, à dépenser cette somme selon le souhait de Jeanne Budes et à obtenir les lettres patentes du roi "en sorte que laditte Dame et successeurs et possesseurs dudit séminaire et communauté ne puissent jamais être troublés pour quelque cause que ce soit". En outre, ils s'engagent à obtenir l'accord et à indemniser Monsieur le Président de Bréquigny, seigneur du fief où Jeanne Budes envisage d'installer cette communauté, dans une maison et dépendances situées non loin de l'église Toussaints.

En 1758, les religieuses quittent ce couvent pour un établissement neuf, rue Saint-Hélier, à l'emplacement de l’actuelle clinique et maison de retraite Saint-Hélier. La congrégation change de nom entre 1960 et 1970 et devient la Fraternité Notre-Dame. Rattachée depuis 1990 à l'ordre du Sacré-Cœur de Jésus, elle n'en occupe plus qu'une petite partie.

Pour en savoir plus : Emmanuelle Daniellou, "Les pensionnaires des Grandes Ursulines de Rennes (1651-1734)", in : Histoire, économie & société, vol. 27, n° 3, 2008, pp. 31-44.


Déclarations de pertes suite à l'incendie de 1720 faites par des femmes

Archives au féminin en 1721

Lire la transcription

En 1720, Rennes est frappée par un tragique et gigantesque incendie qui dévore quasiment la moitié nord de la ville. De très nombreux documents manuscrits, imprimés et iconographiques permettent de documenter le déroulement et les conséquences de ce sinistre événement.

Parmi eux, les registres DD 696 et DD 697, ainsi que les liasses DD 230 et DD 231, rédigés dans les jours qui suivent l'incendie, dressent un état des lieux des dégâts, à travers les procès-verbaux des déclarations faites par les propriétaires des maisons incendiées.

Parmi les propriétaires déclarants leurs pertes mobilières dans ce procès-verbal, plusieurs femmes apparaissent, en l'absence de leurs maris : la demoiselle Anne Paris, les veuves Marie Cochon, Dame Courlois et demoiselle Geneviève Mahé, ainsi que plusieurs marchandes, Perrinne et Gillonne Chevillard, Charlotte Hellard et Jeanne Auffray.

Pour en savoir plus, consultez la galerie "1720, le grand incendie" et l'exposition virtuelle " Il y a trois siècle : Rennes face au grand incendie de 1720".


Femmes contribuables ?

Archives au féminin en 1752

La capitation est un impôt direct issu de la fiscalité royale. Instauré en 1695, il est supprimé en 1697 avant d'être réintroduit en 1701. Les documents conservés aux Archives de Rennes sont essentiellement des registres, appelés "rôles", contenant les listes des contribuables, rue par rue. Les Archives de Rennes conservent 104 registres de capitation de 1702 à 1790, cotés CC 488 à 562 et consultables en ligne, en cliquant ici.

La capitation est un impôt établi sur l'état social ou le revenu présumé des contribuables. Tous les habitants du royaume (à l'exception des plus pauvres et mendiants exemptés et du clergé qui s'en acquitte par un don gratuit) sont soumis à cet impôt direct prélevé au profit du roi. Les nobles et membres du parlement n'y sont cependant pas mentionnés et sont inscrits dans des registres séparés.

Le rôle de captation dresse donc la liste nominative des contribuables, c'est-à-dire des chefs de famille, et leurs professions. Frappées d'incapacité juridique, les femmes mariées ne sont effet pas considérées comme des contribuables, puisque c'est à leur mari de subvenir à leurs besoins. Les domestiques (femmes ou hommes) apparaissent, eux, de façon anonyme à la suite de leur maitre ou maitresse.

Les femmes sont donc très peu visibles dans ces registres. Seules les veuves ou célibataires sans attaches familiales sont recensées comme cheffes de foyer. Dans ce cas, leur profession, souvent de petits métiers mal payés, est parfois précisée comme sur cet extrait où apparaissent la veuve Julienne Allaïre, regrattière, la nommée Georgine, lavandière, la Dauny, journalière.


Poissonnières et regrattières sur le pavé

Archives au féminin en 1752

Lire la transcription

Sous l'Ancien Régime, les boutiquiers exercent leur commerce toutes portes et vantaux ouverts. Les artisans travaillent à même le pavé. Chaque jour, une foule hétéroclite de marchands et marchandes ambulants, colporteurs et camelots envahit la chaussée en criant à qui mieux mieux pour capter l’attention du chaland. Mais la cohabitation entre les commerçant et commerçantes ayant pignon sur rue et les non sédentaires est souvent conflictuelle. On ne compte plus les procès-verbaux dressés par la police et conservés aux Archives de Rennes, en série FF.

Le 25 août 1752, Jacques Anne Dorré, commissaire de police, accompagné d'Alexis Poussain, greffier royal du siège royal de police se déplacent rue de Rohan, suite aux plaintes répétées contre les poissonnières et regrattières (= marchandes qui vendent des comestibles au détail) qui occupent le pavé, gênant la circulation des charrettes et provoquant des accidents.

Les nommées "Françoise Bazin, Ravande, Françoise Lemesle, et Magdelaine Neveu, poissonnières, et autres regrattières" ont refusé d'obéir bien qu'on leur ait "donné ordre plusieurs fois […] de se retirer dans la poissonnerie et de s’y étaler de façon à ne pas gesner le public et aux regrattières et vendeuses de fruit et légumes de se retirer à la place du Champ Jacquet, lieu destiné à cet effet conformément aux arrests et règlements".

Devant leur obstination, le commissaire de police rédige ce procès-verbal et les informe qu'elles seront auditionnées le lendemain à 14h "pour répondre aux conclusions de monsieur le procureur du roy."


Marie Louvel se bat pour exercer sa profession de sage-femme

Archives au féminin en 1780

Lire la transcription.

Sage-femme à Langourla (actuelles Côtes-d'Armor), Marie Louvel souhaite exercer son activité à Rennes. Elle se heurte à l'opposition des matrones de la ville qui lui reprochent d'avoir obtenu un examen pour "travailler en campagne". Marie Louvel adresse alors cette requête au parlement, qui lui ordonne de passer un nouvel examen devant les maîtres du collège de chirurgie en présence de la doyenne des matrones, examen qui lui permettra ensuite d'exercer sa profession à Rennes.

Dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, la formation des sages-femmes se développe fortement grâce aux méthodes d'enseignement pratiques développées par Madame du Coudray (manuel, manipulations sur un mannequin en cuir). Cette dernière se déplace dans toute la France trente ans durant pour faire des démonstrations et donner des cours, qui sont ensuite relayés localement par les chirurgiens. Dix mille sages-femmes sont ainsi formées entre 1760 et 1790. Les États se préoccupent également de former les sages-femmes qui exerceront dans les campagnes pour lutter contre la surmortalité des nouveau-nés.

Nous ignorons où Marie Louvel a suivi son apprentissage, mais il est probable qu'elle ait bénéficié de cet enseignement. Sa requête est révélatrice des tensions qui pouvaient exister dans la profession, et du poids des chirurgiens dans un domaine longtemps réservé aux femmes et qui se médicalise à partir du XVIIIe siècle. Ce texte montre aussi la difficulté pour une femme veuve de subvenir aux besoins de sa famille, dans une campagne pauvre qui ne lui assure pas suffisamment de revenus. La ville apparaît alors comme une promesse de vie meilleure.

Source : Morel (Marie-France), "Accouchement", in Bély (Lucien) (dir.), Dictionnaire d'Ancien Régime, 2010.

Pour aller plus loin : voir Lemaitre (Alain-J.), "La protection de l'enfance, l'intendance et le parlement de Bretagne", in Mémoires de la Société d'histoire et d'archéologie de Bretagne, 1997, p. 99-111.


Filles et femmes à la baignade du Gué de Baud

Archives au féminin en 1784

Excentré à l’est de Rennes, en aval du Moulin-de-Joué, le gué de Baud se situe en campagne jusqu’au milieu du XIXe siècle. Les berges de la Vilaine sont bordées de champs cultivés, et le cours de la rivière y formant un gué, l’activité de baignade semble toujours avoir existé.

Ce document composé de deux arrêts de la Cour de 1759 et 1783 et d'un règlement de 1784 témoignent de l'importance donnée à la police des mœurs. Les filles et femmes y sont particulièrement visées, plus précisément les filles et femmes "de mauvaise vie" qui ont interdiction de "se baigner au gué de Baud, de raccrocher les jeunes gens, tant en ville qu’en campagne". Ce femmes "qui ne sont pas en état de santé, fréquentent habituellement ce lieu" et risquent de croiser et de "corrompre les mœurs" des écoliers et jeunes gens qui y vont se baigner.

Au cours du XIXe siècle, différents arrêtés limitent le droit à la baignade des femmes, leur interdisant les "parties libres de la rivière" et leur imposant de se baigner dans des bateaux-lavoirs fermés. Quant aux militaires, ils se voient imposer leurs propres espaces de baignade, puis des temps hebdomadaires spécifiques.

Plusieurs changements s'opèrent à partir de la deuxième moitié du XIXe siècle. Les pouvoirs publics locaux se préoccupent de la sécurité en autorisant les "bains publics sur les endroits guéables", en imposant la présence d’un maître-nageur et en mettant en place "les secours aux noyés". Par ailleurs, l'émergence de la baignade "loisir" s'accompagne d’une délimitation de son espace : elle s'aménage progressivement rive droite avec enclos, escaliers, hangar, plantation d’arbres… Au début du XXe siècle, les préoccupations hygiénistes de la municipalité poussent à la construction de bains douches et de la piscine Saint-Georges en 1923. Après-guerre, les déchets toxiques déversés par les industries installées Plaine de Baud, joints au "déversement des eaux usées" de l’asile Saint-Méen, rendent dangereuse la baignade dans la Vilaine à Rennes et signent l’arrêt définitif de la baignade du Gué-de-Baud, en 1949.

Pour en savoir plus sur le quartier de Baud-Chardonnet, cliquez ici.


Les "mauvaises filles" de Saint-Cyr

Archives au féminin de 1808 à 1986

À la Révolution, les bâtiments conventuels des Calvairiennes de Saint-Cyr situés au bord de l'Ille, à l'ouest de Rennes, deviennent propriété de la Ville et servent de caserne et de prison. En 1808, un décret impérial en fait don aux religieuses de Notre-Dame de la Charité qui se consacrent à l'éducation des jeunes filles en difficulté.

Jusqu’à la fin du XIXe siècle, cette institution de rééducation accueille les "mauvaises filles" pour des séjours de dix jours à un an. Cette "maison de redressement" compte jusqu'à 300 filles placées et une centaine de religieuses. Filles de justices, orphelines ou filles de l'assistance publique cohabitent dans un domaine clos de murs de 5 hectares. Elles vivent en complète autarcie, fournissant une main d'œuvre peu coûteuse très prisée des casernes, lycées, commerces ou hôtels de la ville pour des travaux de couture, broderie, tricot, tissage, bonneterie et blanchisserie.

Après la Seconde Guerre mondiale, les temps changent : Saint-Cyr perd sa clôture en 1967 et développe de nouvelles méthode éducatives. Les premiers éducateurs hommes sont intégrés en 1970 et un foyer maternel pour femmes avec enfant est ouvert en 1973. En 1979, une première maison de retraite est ouverte aux Petites Sœurs de l'Assomption, puis en 1981 à l'ensemble des habitants de Rennes et des environs.

En 1986, le domaine Saint-Cyr est vendu à la ville de Rennes. Situé en face du théâtre et de la MJC La Paillette, il comprend aujourd'hui la maison de retraite, la résidence Léon Grimault, des logements étudiants, un immeuble H.L.M., le centre d'accueil d'urgence "L'Abri" et un grand parc !

Pour en savoir plus, consultez l'article de Katell Bodin, "Le domaine de Saint-Cyr de conversion en reconversion", in Place Publique, mai-juin 2011, p. 128-133.


Réclamation des religieuses du Bon Pasteur

Archives au féminin en 1829

Lire la transcription.

La congrégation religieuse du Bon Pasteur, a été établie pour recevoir les femmes repenties (anciennes prostituées ou femmes de "mauvaise vie") afin de les soigner et de leur apprendre un métier.

Cette institution a été autorisée par la ville de Rennes puis par lettres patentes du roi en 1665. La congrégation des filles du Bon Pasteur s'installe en 1749 dans le couvent construit à cet effet rue de Bel-Air (actuel n° 5 rue Jean-Baptiste Martenot). Par suite des mesures révolutionnaires, les religieuses ainsi que les pénitentes accueillies sont renvoyées de leur maison. L'édifice sert alors de prison pour religieuses puis pour prêtres réfractaires.

Dans cette lettre datant de 1823, les religieuses s'adressent au comte de Ferrières, commissaire du roi, afin de lui demander l'autorisation de se réunir dans leur ancienne maison. Leur demande demeure vaine. Tout au long du XIXe siècle et jusqu'en 1956, les bâtiments sont affectés à usage de caserne. Après diverses utilisations administratives, le couvent du Bon Pasteur est acquis par le conseil régional qui y fait d'importants travaux de restauration et s'y installe en 1981.

Pour aller plus loin : Archives départementales d'Ille-et-Vilaine, série H : 29 H 8-19, communauté du Bon Pasteur.


Marie Rose, détenue à la Maison centrale de Rennes

Archives au féminin en 1861

Lire la transcription.

La Maison centrale de Rennes est installée depuis 1809 dans l'ancien dépôt de mendicité et de répression situé rue Saint-Hélier (à l'emplacement actuel du TNB). Mixte à l'origine, elle accueille exclusivement des hommes de 1842 à 1853. À partir de cette date, elle est uniquement affectée aux femmes, quelle que soit leur peine. Elle est reconstruite au sud de la gare de Rennes de 1863 à 1878, date à laquelle le transfert de la totalité des détenues est achevé.

Des recherches dans les registres d'écrous conservés aux Archives départementales d'Ille-et-Vilaine montrent qu'au cours du XIXe siècle, 73% des détenues y sont condamnées à des peines d'enfermement entre 1 et 5 ans. Les peines de travaux forcés sont minoritaires : 10%, contre 90% de peines d'enfermement. À Rennes, les femmes, sont principalement condamnées pour des crimes contre les biens puisque plus de la moitié des détenues sont condamnées pour vol. Les autres infractions majeures sont la prostitution et l'infanticide. Au regard de ces données, le cas de Marie Rose rend compte d'une criminalité relativement "classique".

Dans cette lettre, Marie Rose, détenue à la Maison centrale de Rennes, adresse une lettre au maire de Rennes pour lui demander de lever sa peine, inquiète des conditions de vie de son jeune enfant et de la charge de famille qui pèse sur sa mère. Ce courrier isolé est bien énigmatique et appelle des recherches complémentaires.

Les archives pénitentiaires conservées aux Archives départementales d'Ille-et-Vilaine nous mettent sur la piste d'une Marie Françoise Rose qui semble bien être la même personne. Le registre d'écrou nous apprend qu'elle est âgée de 38 ans, qu'elle mesure 1,58 m, qu'elle a les cheveux noirs, le front haut, les yeux bleus et le visage ovale. Dans son jugement rendu le 26 juin 1858 par la chambre correctionnelle du tribunal de première instance de Rennes, nous apprenons que Marie Rose est une fille publique demeurant à Rennes rue Saint-Benoit et qu'elle a été condamnée à 5 ans de prison pour le vol d'une pièce de 5 francs et d'une montre en or à un homme. Récidiviste, elle a déjà subi 7 condamnations dont une à une peine de travaux forcés, prononcée le 6 novembre 1848 par la Cour d'assise de Rennes pour crime de vol. Il n'est cependant à aucun moment question d'un enfant.

Sources : Archives départementales d'Ille-et-Vilaine. 6Y3 à 6Y7 et 6Y10 à 6Y14 (registres d'écrou), notamment concernant Marie Rose, 6 Y 12, 3 U 4/3480 (jugement du 26 juin 1858) et 2 U 822 (dossier de procédure d'assises).


La première prison pour femmes en France

Archives au féminin de 1863 à 1878

Située sur le plateau de Beaumont-Châtillon, la "Maison Centrale de Force et de Correction" est le premier établissement pénitentiaire construit pour accueillir uniquement des femmes en France. Elle est affectée aux longues peines d'emprisonnement et conçue pour accueillir jusqu'à 900 détenues. Jusqu'en 1905, les sœurs de la congrégation de Marie-Joseph sont chargées de leur surveillance.

Ce bâtiment imposant, encore visible aujourd'hui, est construit entre 1863 et 1878 pour remplacer la Maison centrale de la rue Saint-Hélier. Il se situe alors en dehors de la ville, au sud de la voie ferrée. C'est Alfred-Nicolas Normand, alors tout juste nommé inspecteur général des édifices pénitentiaires, qui en conçoit les plans, assisté de l’architecte local Charles Langlois.

Le bâtiment de détention de forme hexagonale est inspiré de la prison parisienne de la Roquette inaugurée en 1830. Il est inscrit dans un quadrilatère délimité par un mur d'enceinte de granit et de schiste, flanqué de quatre tourelles d'angle. À l'entrée, les bâtiments de service (administration, logement du personnel) donnent sur une cour d'honneur. Le rez-de-chaussée du bâtiment de détention abrite les ateliers, le réfectoire ainsi qu'une galerie couverte, bordant une cour ornée d'une fontaine centrale. Les dortoirs sont situés à l'étage car, à cette époque, les détenues ne sont pas logées en cellules individuelles. Une chapelle est située côté sud.

Ce domaine de 9 hectares comprend aujourd'hui le centre pénitentiaire de femmes, la direction régionale des services pénitentiaires de Rennes et des logements pour les personnels.

Pour en savoir plus sur l'histoire des prisons de Rennes, consultez l'article de Sophie Chmura, "Une histoire architecturale", in Place Publique n°14, nov-déc. 2011.


Les "filles publiques" des maisons de tolérance

Archives au féminin en 1870

Lire la transcription.

Entre 1830 et 1870, les ouvertures de maisons de tolérance, couramment appelées maisons closes, se multiplient, reflétant un phénomène social majeur dont témoignent ces documents.

Appelées ainsi parce que leurs volets devaient être solidement cadenassés, ces maisons sont gérées par des tenancières dûment habilitées par la mairie : outre un certificat de bonne moralité délivré par le commissaire de police, elles doivent déclarer leurs pensionnaires soumises à la visite médicale que la commune organise à leurs frais.

Si un vol a effectivement été commis dans la maison de Mme Dijon, peut-être est-ce dû aux conditions très difficiles dans lesquelles ces "filles publiques" travaillent ? Elles sont en effet contraintes de verser une large part de ce qu’elles ont gagné en offrant leurs corps, en échange du logement, de la nourriture et souvent de l’achat de produits de beauté. Cela devient rapidement un engrenage et ces jeunes femmes se voient endettées au point de ne plus pouvoir envisager de partir.

Interdites de publicité, les maisons de tolérance se font souvent connaître sous l'enseigne d'un estaminet, comme le bar La Féria, du 17 puis 19 boulevard de Solférino. La loi dite Marthe-Richard d'avril 1946 fait fermer 1800 établissements de ce genre en France.


Ouvrières et petites mains

Archives au féminin de 1871 à 1910

Dans la répartition genrée du travail du XIXe siècle, les tâches nécessitant patience, précision, endurance et doigts agiles sont largement dévolues aux femmes.

À Rennes, l'Arsenal et l'entreprise Oberthür par exemple, emploient de gros bataillons féminins tandis que les états numériques des livrets d'ouvriers délivrés à la mairie de Rennes à la fin du XIXe siècle attestent de l'activité de nombreuses couturières, brodeuses, lingères, piqueuses de bottines, chamareuses et autres blanchisseuses.

En  1870, on dénombre 68  lavandières ou blanchisseuses à Rennes, souvent  installées sur les berges ou sur les marches des escaliers menant à l’eau et, en 1900, 39 buanderies ou bateaux-lavoirs sur l’Ille et 12 sur la Vilaine ! Dans le centre de Rennes, les bateaux à lessive amarrés quai Lamennais font souvent l’objet de plaintes de la part des passants et résidents incommodés par les fumées des buées. Ils  seront  bientôt  poussés du centre, première mesure d’éloignement des activités industrielles.

Pour en savoir plus, parcourez la galerie "Les usages de la Vilaine".


L'instruction des jeunes filles au 19e siècle

Archives au féminin en 1875

Le 19e siècle est le siècle de tous les combats pour l'instruction et la scolarisation des enfants, avec un traitement différencié entre les jeunes filles et les jeunes garçons.

Dans ce courrier daté du 26 novembre 1875, le préfet d'Ille-et-Vilaine s'adresse au maire de Rennes et dresse le bilan de l'instruction des jeunes filles employées dans les différentes manufactures de la ville. Le constat est alors sans appel, les jeunes rennaises ''sont presque toutes entièrement dépourvues d'instruction''. Soucieux du problème, le préfet invite alors le maire de Rennes à subventionner la mise en place de cours du soir dans les écoles privées pour filles, existant alors dans la ville ''à l'exemple de ce qui se fait déjà pour les adultes hommes dans trois écoles municipales pour garçons''.

Malgré la loi Duruy de 1867 qui oblige les villes de plus de 500 habitants à ouvrir au moins une école municipale pour jeunes filles, il n'existe alors aucune école de ce type à Rennes. Ce n'est qu'en 1878 que la municipalité rennaise commence à combler ce retard en ouvrant l'école du boulevard de la Tour d'Auvergne.

Le long combat pour l'égalité face à l'instruction s'engage. En 1880, la loi Camille Sée crée l'enseignement secondaire pour filles mais il ne s'agit alors que d'instruire les filles pour être de bonnes épouses et de bonnes mères ! Il faut attendre 1924 pour que l'enseignement dispensé dans les écoles soit le même pour les filles et les garçons.


Un projet d'école primaire de jeunes filles

Archives au féminin en 1879

Située au sud du boulevard de la Duchesse-Anne, l’école du même nom est la deuxième école de filles construite à Rennes, à la fin du XIXe siècle. Il existe alors un gros déficit d’accueil, quand on sait que 2500 jeunes filles âgées de 7 à 13 ans sont, à cette époque, susceptibles d’être scolarisées.

Dans un contexte de laïcisation de l’instruction publique et d’obligation scolaire (lois Ferry de 1881 et 1882) mettant un terme au travail des enfants durant le XIXe siècle, les "maisons d’école" deviennent de véritables bâtiments conçus dans un objectif de praticité, de sécurité et d’hygiène. Les communes doivent mettre à disposition de la population des équipements en capacité de recevoir aussi bien les garçons que les filles.

C’est en 1879 que la ville de Rennes décide de faire construire une nouvelle école de jeunes filles, afin de répondre à un besoin de la population, renforcé par une volonté politique de rendre progressivement l’instruction publique primaire obligatoire. C’est Jean-Baptiste Martenot, architecte de la Ville, qui est chargé de la réalisation des plans dont la construction est projetée sur le boulevard de la Duchesse-Anne. Le plan retenu prévoit que l'école se situe à l'ouest pour trois raisons : cette configuration permet de profiter de la lumière naturelle tout au long de la journée du fait de l’orientation est/ouest, il n'y a pas de vis-à-vis direct avec le voisinage et l'école est ainsi protégée du bruit provoqué par l’usine Perrigault, située à l’emplacement actuel du square Lucien-Rose.

Au cours du XXe siècle, l’école connaitra des extensions, suivant les plans d’un autre architecte de la Ville, Yves Le Moine. Ces nouveaux aménagements en feront un véritable groupe scolaire accueillant plusieurs niveaux scolaires, bien différent de la "maison d’école" d’origine.


Les ouvrières à Rennes à la fin du XIXe siècle

Archives au féminin en 1882

Le 13 novembre 1882, le maire de Rennes, Edgar Le Bastard, reçoit de la Préfecture une demande de renseignements en vue de l'examen et de l'étude d'une proposition de loi ayant pour objet de modifier la loi du 19 mai 1874 concernant le travail des femmes adultes.

Pour pouvoir répondre au Préfet, le maire diligente une enquête du commissaire central de police qui lui transmet, le 24 mars 1882, le tableau joint assorti d'un petit rapport qui dresse un état précis du nombre de femmes et filles employées dans les manufactures rennaises, de leurs heures de travail et de leurs salaires, quel que soit leur âge.

D'après ce recensement, 1013 femmes travaillent en usine à Rennes, majoritairement dans l'industrie militaire, en particulier à l'Arsenal, et dans les imprimeries. 35 d'entre elles ont entre 12 et 16 ans et 145, entre 16 et 21 ans. Toutes font des journées de 10 heures pour un salaire compris entre 1 et 2,50 francs, les jeunes filles étant d'ailleurs globalement moins payées que leurs ainées.

On peut imaginer les conditions de vie des ouvriers et ouvrières quand on compare ces salaires aux prix des loyers, donnés par le commissaire dans son rapport : " Nos usines sont toutes dans l'intérieur de la ville, la cartoucherie seule est à quelque distance, une demi-lieue environ de la grand place ; nous n'avons pas de logements ouvriers proprement dits, les ouvriers se logent dans tous les quartiers et leurs loyers s'élèvent […] de 75 à 150 francs"


Hedwige Berthelot de la Bunelaye, une aristocrate au début du XXe siècle

Archives au féminin de 1885 à 1960

Patrick de Panthou, descendant de la famille Berthelot de la Bunelaye, a fait don des archives de sa famille aux Archives de Rennes en 2018-2019. Couvrant plus de deux siècles et concernant une vingtaine d'individus, dont 13 femmes, il s'agit d'un des rares fonds d'archives familiales conservé aux Archives de Rennes.

Originaire de Betton, les Berthelot de la Bunelaye ont occupé un rang distingué dans la bourgeoisie de Rennes, certains occupant d'importantes fonctions durant l'Ancien Régime. Ils se sont également alliés avec des familles locales, en particulier au XVIIIe siècle avec la famille du maire Rallier du Baty.

Grand-mère maternelle du donateur, Hedwige Berthelot de la Bunelaye (1885-1960), née Eudes d'Eudeville, est originaire de Seine-Maritime. Elle est l'aînée de trois sœurs, Agnès, Noémi et Béatrix. Elle épouse le 21 mai 1907 le comte Henri Albert Berthelot de la Bunelaye, de 13 ans son aîné. Ils auront trois enfants : Éliane, Guy et Jehane, dite Janine. Après le décès de son mari en 1912, Hedwige Berthelot de la Bunelaye s'installe à Rennes, rue Vasselot.

Les documents conservés et transmis par la famille sont à l'image de nombre d'archives familiales : actes et faire-part de naissance, mariage et décès, images pieuses, photographies... Ils permettent de retracer les grandes étapes de la vie, civile et religieuse, d'Hedwige Berthelot de la Bunelaye. Une quinzaine de photographies dont celle présentée ici lui donne vie : elle y apparaît seule ou en famille, à la mer, à la montagne ou à la terrasse d'un restaurant. Certaines sont plus inhabituelles, tels ces cinq portraits pris dans un photomaton des Galeries Lafayette. Contrairement aux archives relatives à ses sœurs, celles d'Hedwige Berthelot de la Bunelaye ne contiennent pas de correspondance, mais un document qui leur valent d'être présentées ici : un petit carnet de toile qui dresse l'inventaire de son trousseau de mariage (ses habits de mariée, mais aussi de voyage, ou encore le linge de maison) !

L'ensemble donne à voir le train de vie d'une aristocrate de cette époque, tout en interrogeant sur les traces que laisse un individu dans les archives, sur celles qu'il importe de conserver pour sa famille et ses descendants.


Coëtlogon, l’École nationale d'agriculture de jeunes filles

Archives au féminin en 1886

Dans le souci d'améliorer la fabrication du beurre et de soutenir sa production face à la concurrence, dans une région où l'industrie laitière est une nécessité pour l'agriculture, une école de laiterie est annexée à la ferme-école des Trois-Croix en 1886. D'autres écoles pratiques consacrées à l'industrie du lait voient le jour en France sous la Troisième République mais celle de Rennes a une particularité : elle est la seule destinée à former des jeunes filles !

Voisines l'une de l'autre, les deux écoles proposent des enseignements très différents : aux garçons des Trois-Croix les travaux dans les champs et dans l'étable, aux filles de Coëtlogon, l'entretien de la basse-cour et la fabrication du beurre et du fromage.

L'école pratique de laiterie de Coëtlogon, qui accueille des filles dès l'âge de 14 ans, issues de familles d'agriculteurs d'Ille-et-Vilaine mais aussi d'autres départements et même de l'étranger, dispense donc un enseignement technique qui s'accompagne également d'une formation ménagère et morale. Les cours d'économie domestique, couture, hygiène et ménage, éducation morale et comptabilité deviennent d'ailleurs progressivement prépondérants, afin de faire de ces jeunes filles de parfaites fermières et maîtresses de maison.

Pour aller plus loin, consultez l'article de Martine Cocaud, "L'avenir de Perette. Les premiers établissements féminins d'agriculture : les écoles pratiques de laiterie", in : Annales de Bretagne et des pays de l'Ouest. Tome 106, n° 1, 1999. pp. 121-135.


Anne Marie Trubert, vendeuse de châtaignes

Archives au féminin en 1889

Dans la série I (police, hygiène publique, justice), les demandes des colporteurs et colporteuses adressées au maire sont nombreuses. C'est le cas de la veuve Trubert qui demande au maire l'autorisation de prendre la place de la Veuve Barbé entrée à l'hospice des femmes. Elle souhaite en effet vendre des fruits et des châtaignes sur la place de la halle aux blés. Sa demande, comme toutes les autres, fait alors l’objet d’une enquête de police sur sa conduite, sa moralité, ses moyens d'existence et sa situation de famille. Dans la fiche de renseignements rédigée par le commissaire de police, on apprend qu'Anne Marie Trubert, née Baudu, est rennaise depuis 52 ans et habite au 75, rue de Nantes. Âgée de 62 ans, elle est marchande de légumes mais son commerce ne peut subvenir à ses besoins et ses deux enfants mariés de 37 et 36 ans ne peuvent lui venir en aide. Sa demande est donc bien un moyen d’échapper à la misère, mais il s'agit là d'une activité bien précaire.

Le 2 novembre 1899, les vendeurs et vendeuses de châtaignent adressent une pétition au maire contre son arrêté demandant de faire disparaître les tentes qui leur servent d’abri : "Nous ne sommes que de pauvres pères et mères de famille ne vivant que de notre gain et il serait vraiment malheureux pour nous de voir venir l’hiver et ses misères sans que nous puissions, comme les années précédentes, gagner notre pain en vendant des châtaignes."


Installation des religieuses de Saint-Vincent-de-Paul à l'Hôtel-Dieu

Archives au féminin en 1896

Accéder au document dans son intégralité

La commission administrative des hospices civils vote le 22 mai 1896, le remplacement des religieuses hospitalières de la communauté de Saint-Yves, dites religieuses de Saint-Augustin, par les religieuses de l'Ordre de Saint-Vincent-de-Paul, les Filles de la Charité, pour le service de l'hôpital.

Après négociation avec la Supérieure générale et les sœurs assistantes, économe et dépensière de la communauté, un traité est signé pour "arrêter les conditions auquel le service intérieur de l'Hôtel-Dieu est confié à ladite communauté".

Ce document nous indique que les sœurs sont au nombre de 25. Dans les dortoirs, certaines sont chargées des soins aux malades avec l'aide des infirmiers et infirmières, d'autres de la distribution des médicaments et des repas, voire, "si les besoins du service l'exigent", de l'assistance en salle d'opération "dans les limites de la bienséance et de la modestie".

En dehors des salles de soins, les sœurs prennent en charge des fonctions logistiques, de gestion (cuisine, lingerie, buanderie, pharmacie) et d'entretien des locaux, en veillant particulièrement à la propreté de l'ensevelissoir et de la salle d'autopsie.

Les sœurs de la Charité sont logées, blanchies, nourries, éclairées et soignées sur place. Pour cela, l'administration des hospices prévoit, à leur arrivée, une dépense de 12 500 francs pour le vestiaire et la nourriture. Dans sa délibération du 11 septembre 1896, le conseil municipal remercie les religieuses Augustines de leur dévouement ; il décide par ailleurs d'apporter une aide financière aux hospices parisiens des Filles de la Charité, destinée à payer les frais de voyage des nouvelles religieuses de Paris à Rennes.


Séverine, une figure féministe au cœur du procès Dreyfus

Archives au féminin en 1899

Été 1899, la ville de Rennes vit au rythme des audiences du procès en révision du capitaine Dreyfus, qui se tiennent dans les murs de l'actuel lycée Émile Zola. Soucieuse du maintien de l'ordre public, la municipalité dépêche alors un de ses agents pour lui relater le contenu des audiences mais aussi pour l'informer de la tenue de réunions publiques se déroulant dans la ville.

Dans ce billet daté du 1er septembre 1899, l'agent municipal évoque la tenue d'une réunion organisée par le Cercle d'Études Sociales de Rennes, organisation étudiante, tête de pont de la défense du capitaine Dreyfus à Rennes. On y observe la présence, parmi les invités, de nombreuses personnalités dreyfusardes en vogue : Jean Jaurès, René Viviani, Victor Basch mais aussi Madame Séverine.

Caroline Remy, dite Séverine, est une figure pionnière du féminisme à la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle. Première femme journaliste à vivre de sa plume, elle dirige un temps le Cri du Peuple et collabore à plusieurs journaux dont la Fronde, seul quotidien de l'époque entièrement dirigé par des femmes. Membre de la Ligue des droits de l'homme, Séverine s'engage dans la cause dreyfusarde et couvre le procès pour le quotidien féministe. À Rennes, elle met son militantisme au service de la cause en chroniquant les audiences et en animant diverses conférences. Elle participe par ailleurs aux rencontres de l'auberge des Trois Marches, rue d'Antrain, fief dreyfusard à Rennes.


Le soutien aux mères par "La Goutte de lait"

Archives au féminin en 1900

À partir de 1860, l'aide sociale est essentiellement prise en charge par le bureau de bienfaisance qui organise le secours aux indigents grâce aux rentes de ses biens et aux dons, collectes et subventions accordés par la municipalité ou des particuliers bienfaiteurs. Ce bureau est placé sous l'autorité d'une commission administrative composée du maire et de quatre membres nommés par le préfet. Il apporte des secours en nature (aide alimentaire, matériaux de chauffage, médicaments, linge), des secours en argent, souvent sous forme de loyers, et de l'aide à l'apprentissage pour assurer la prise en charge d'enfants par des maitres ouvriers. Il organise les distributions de "soupes économiques", dispense des soins à domicile et possède aussi un orphelinat, un ouvroir et, à partir de 1900, l'œuvre de la Goutte de lait.

Fondée en 1900, celle-ci répond aux préoccupations du temps. L'assistance publique, dans la lutte contre la mortalité infantile, vise en effet tout particulièrement les nourrissons et leurs mères, qu'il s'agit de soutenir à travers des aides matérielles et des principes d'éducation maternelle. La loi Roussel de 1874, relative à la protection des enfants du premier âge, impose le contrôle des sociétés de charité maternelle et l'organisation de consultations de nourrissons et de gouttes de lait. Elle encourage, par voie de subventions, les initiatives ayant pour but d'aider la mère pendant sa grossesse, de la soigner pendant et après l'accouchement et de suivre l'enfant pendant les deux   premières années de sa vie.

La Goutte de lait se présente donc "à la fois comme un centre de distribution de lait stérilisé et un foyer d'éducation et d'instruction pour les mères" indigentes qui ne peuvent allaiter leur enfant.  Des consultations hebdomadaires par un médecin sont mises en place rue du Griffon à Rennes dès 1901. L'œuvre du Docteur Leray devient une association en 1945, placée sous la surveillance des crèches Papu et Saint-Malo. Mais les difficultés que rencontre le bureau de bienfaisance à se mettre aux normes imposées par une nouvelle réglementation dans les années 1950, lui imposent finalement de supprimer le service de La Goutte de lait à partir du 15 février 1954.

Pour en savoir plus, consultez le mémoire de Marie Moal, "Le bureau de bienfaisance de Rennes (1919-1953) : genre, inégalités et aide sociale", Histoire, Université de Rennes 2, 2017.


Femmes en costumes traditionnels

Archives au féminin en 1900

Ces cartes postales représentent des femmes en costume traditionnel des environs de Rennes. Au XIXe siècle, les gravures, les lithographies puis les cartes postales diffusent des images des provinces françaises en insistant sur leur caractère pittoresque, voire caricatural. Elles mettent en scène des bretonnes en tenue de cérémonie ou en tenue ordinaire et aujourd'hui sont une source précieuse pour l'histoire du costume.

Le costume du quotidien qui sert aux activités domestiques ou professionnelles est sans fantaisie, systématiquement composé d'une robe noire recouvrant tout le corps et de quelques accessoires, comme le tablier et le châle qui recouvre les épaules. Au moment des fêtes, le costume s'éclaircie, dentelles et broderies égayent la tenue.

Pour autant, ces représentations donnent de la bretonne une image très austère, renforcée par la coiffe qui cache la chevelure et dont la forme permet d'identifier la localité. De ces silhouettes du passé à aujourd'hui, on mesure l'évolution des mœurs, des codes et des modes vestimentaires.


Projet de création d'une école d'infirmières à Rennes

Archives au féminin en 1902

Accéder au document dans son intégralité

Par la circulaire du 28 octobre 1902, le ministre de l'Intérieur et des cultes appelle l'attention des préfets sur la nécessité de créer dans chaque département une école d'infirmières en ces termes : "Plus la science progresse, plus apparait l'importance du rôle de l'infirmière ; plus aussi, il devient manifeste que, pour remplir ce rôle, le bon vouloir, le dévouement, l'abnégation même ne suffisent pas, il faut de plus une instruction technique. […] C'est une œuvre importante, une œuvre d'avenir que je vous invite à entreprendre et dont les derniers termes seront d'une part un service public convenablement outillé, d'autre part, un débouché ouvert aux activités féminines sur le terrain où elles peuvent se déployer le plus utilement."

La commission administrative des hospices civils de Rennes n'étant pas en mesure de financer la création d'une école, elle vote en décembre 1903, l'organisation de cours dispensés par un médecin et un chirurgien, à l'Hôtel-Dieu, non seulement aux infirmiers et infirmières, mais aussi aux personnes désireuses de les suivre, religieuses comprises.

Il faut attendre 1924 que pour le projet de création d'une véritable école d'infirmiers et d'infirmières soit enfin d'actualité. L'instruction à donner aux élèves doit porter sur toutes les branches de la science et de l'hospitalisation, sous forme d'enseignements théoriques et pratiques (médecine générale des contagieux et non contagieux, chirurgie générale, affections chroniques et d'urgence, assistance aux opérations, stérilisation, pansements, asepsie), permettant aux élèves de passer le concours d'État.

Jeanne Chauveau, infirmière, fut la directrice de l’école régionale d’infirmières hospitalières et d’assistantes sociales de Rennes de 1937 à 1965. Le passage en impasse entre la rue de Saint-Malo le cloître de l'Hôtel-Dieu porte son nom.


Les femmes, cibles des politiques natalistes

Archives au féminin en 1904

Après la défaite de 1870, la nécessité de repeuplement devient une priorité pour les autorités publiques. Or, la mortalité infantile est très importante à la fin du XIXe siècle. Épidémies de choléra et de tuberculose et mauvaises conditions de vie (logements insalubres, alcoolisme, manque d'hygiène) déciment les populations.

Des initiatives publiques et privées voient le jour pour lutter contre ces maux. Après les conseils départementaux d’hygiène créés dès 1848, le ministère de l’Hygiène, de l’assistance et de la prévoyance sociale centralise en 1920 l’ensemble de l’action publique dans ces domaines. Aux côtés du bureau de charité devenu bureau de bienfaisance en 1919, la municipalité rennaise, à travers son bureau d'hygiène municipal créé en 1907, devient également un acteur social local incontournable.

La ville se préoccupe en particulier de la santé des femmes enceintes et des nourrissons et soutient une propagande nataliste à destination des mères de famille. Dans ce contexte, elle autorise par exemple l'organisation d'un "concours des bébés" en 1904 par la société d'hygiène de l'enfance, ouvert aux enfants d’un mois à cinq ans.

Les enfants lauréats sont sélectionnés parmi "les plus beaux et les mieux élevés" de la ville et reçoivent diverses récompenses telles que médailles, brevets et diplômes, livrets de caisse d’épargne, bons de photographie, etc. Derrière cette manifestation apparemment futile, les motivations du comité d'organisation sont parfaitement claires dans cette lettre de demande : "vulgarisation de l'hygiène infantile, lutte, par l'émulation, contre la mortalité des enfants en bas âge et la dépopulation."


L'émancipation par le sport

Archives au féminin en 1914

Les grandes fêtes sportives, au-delà de leur fonction politique, éducative et patriotique, sont également l'occasion pour les jeunes filles de défiler et de faire progressivement changer le regard sur le sport et le corps féminin.

C'est le cas de la 40e fête fédérale de gymnastique organisée les 30, 31 mai, 1er et 2 juin 1914 sous la présidence de Raymond Poincaré, président de la République, et en présence de multiples délégations européennes (Russes, Italiens, Britanniques, Suisses, Bulgares, etc.). Les fêtes annuelles de la jeunesse des écoles laïques puis des écoles libres sont également l'occasion de défilés et de démonstrations sportives mixtes dès 1925 et contribuent à la diffusion des valeurs et de l'esprit sportif chez les garçons et les filles.

Ce document montre que les jeunes sportives sont aussi à l'honneur de la grande fête fédérale de gymnastique de la Fédération féminine française de gymnastique et d'éducation physique organisée à Rennes en 1924, à l'occasion de l'inauguration du stade vélodrome. Elle rassemble une centaine de sociétés sportives et quelque 2000 jeunes filles.

Malgré ces avancées, les sections féminines peinent à exister et il faut attendre les années 1950 pour que l'appel aux adhésions s'adresse aussi aux filles et les années 1970 pour que tous les clubs sportifs aient une section féminine.

Pour aller plus loin, parcourez l'exposition virtuelle "The Great Attraction", réalisée par les étudiantes de la promotion Grace Hopper du Master Humanités Numériques de l’Université de Rennes 2 en 2021-2022.


Les ouvrières à domicile se constituent en syndicat

Archives au féminin en 1915

Fin XIX-début XX siècles, les commissaires municipaux sont un maillon important du dispositif national et local de police, notamment en matière de renseignement politique ou social. Agent de surveillance, le commissaire central de police envoie régulièrement des rapports au Préfet d'Ille-et-Vilaine, au maire de Rennes, voire au Procureur de la République pour rendre compte d'opérations de surveillance ou d'événements ayant causés des troubles à l'ordre public.

Deux rapports du commissaire central de 1915 (cotés I 79) relatent notamment le déroulé de deux réunions professionnelles des ouvrières à domicile, organisées par la Bourse du travail les 5 et 12 décembre 1915 à la halle aux toiles.

La première réunion rassemble 250 "ouvrières du vêtement, de la chaussure, et de la confection militaire de toutes spécialités" et vise à leur expliquer la loi du 10 juillet 1915 sur le minimum de salaire et à les mobiliser afin qu'elles s'organisent en syndicat, seul capable de défendre leurs intérêts.

Une soixantaines d'ouvrières se réunissent donc le dimanche suivant pour créer la Section des ouvrières de l'habillement travaillant à domicile, affiliée au Syndicat de l'habillement, lui-même adhérent à la Fédération de l'habillement. Les statuts acceptés et le montant des cotisations mensuelles étant arrêté (0,75 frcs), un bureau provisoire "composé des dames Gratien, comme secrétaire et Picoult, comme trésorière" est élu à mains levées.


Pétition des femmes exploitantes des fermes du sud de Rennes

Archives au féminin en 1916

Le 8 février 1916, Madame Guimont, à la tête de la ferme de la Binquenais à Rennes, prend la plume pour s’adresser au commandant de la place de Rennes. Sous la forme d’une pétition qu’elle cosigne avec d’autres exploitantes agricoles contre le départ imminent du 24e régiment de dragons cantonné aux alentours de Rennes, elle témoigne, par écrit, des conséquences économiques de la guerre dans le domaine de l’agriculture.

Encore peu mécanisés, les travaux agricoles pâtissent du départ des hommes au front mais également de la réquisition des animaux, chevaux ou mulets. Madame Guimont fait état de ce constat dans son courrier, évoquant "la main-d’oeuvre civile" qui fait "totalement défaut depuis le début de la mobilisation". Pour pallier ce manque, on emploie les soldats de passage dans la région. Si leur cantonnement nécessite la réquisition de nombreuses habitations, terrains et matériels, il permet aussi aux nombreuses femmes en charge d’exploitations agricoles d’obtenir une aide "absolument indispensable pour [leurs] travaux de culture".

Cette pétition signée par six exploitantes témoigne en outre du rôle primordial que jouent alors les femmes à l’arrière. Situation impensable avant la guerre, elles n’ont d’autre choix que de remplacer leurs maris pendant le conflit. Dans les campagnes ou dans les villes, dans les champs et dans les usines, ce sont les femmes qui vont permettre au pays de maintenir cet effort de guerre pendant toute la durée du conflit.


La petite Liliane Fontaine écrit à son père pendant la Première Guerre mondiale

Archives au féminin en 1917

Liliane Fontaine est née en 1906 et vit à Brain en Ille-et-Vilaine. Son père Amand, instituteur laïc, est mobilisé dès le 4 août 1914 au sein du 76e régiment d’infanterie de Vitré. Il connaîtra très vite la traumatisante expérience des tranchées lors de la meurtrière première bataille d’Ypres avant d’être rattaché auprès de l’état-major en Belgique, comme vaguemestre en charge du courrier.

Durant toute la durée du conflit, Liliane n’aura de cesse de lui écrire pour lui raconter son quotidien à l’arrière auprès de sa mère Henriette et de sa petite soeur Odette, mais aussi pour lui témoigner son affection et lui rappeler à quel point son absence lui pèse.

Parfois anodins, ces mots témoignent de ce lien ténu qui unit encore les soldats et leurs proches dans les atrocités de la guerre et qui leur permet, de part et d’autre, de tenir. Dans cette lettre en particulier, datée du 11 novembre 1917, Liliane exprime son impatience à l’idée de voir arriver les soldats américains, préalable nécessaire à la fin de la guerre et au retour tant attendu de son père.


Berthe Schilizzi au secours des réfugiés belges

Archives au féminin en 1917

Éloignée des lignes de front, Rennes traverse la Première Guerre mondiale à bonne distance des combats mais appréhende la violence du conflit par l'afflux massif des blessés et des réfugiés du Nord, de l'Est et de Belgique. En mars 1917, 7000 réfugiés arrivent à Rennes. Pour apporter un réconfort matériel et moral à ces populations désœuvrées, les bonnes volontés se mobilisent sous la coordination du Comité central de secours de guerre.

Des œuvres de bienfaisance, philanthropiques et patriotiques, voient le jour. C'est dans ce contexte que Berthe Schilizzi, fondatrice et directrice de l'œuvre de bienfaisance ''Le Poupon Belge'' est de passage à Rennes en 1917, avec pour objectif d'''habiller les petits réfugiés, de les réunir en de jolies fêtes avec des petits Français, de leur offrir jouets et gâteaux ainsi qu'à nos chers blessés. Mais son but principal est de faire partout une propagande en faveur du culte de reconnaissance que nous devons, tous, à la sainte Belgique, à l'héroïsme de son armée, et par-dessus-tout à son roi héros''.

Au gré de ses déplacements pendant la durée du conflit, cette femme de lettres belge anime des conférences, organise des galas, lève des souscriptions pour venir en aide à ses compatriotes dans le besoin. Accueillie en grande pompe à Rennes, elle reçoit un soutien moral et financier de la part de la municipalité. Dans la foulée de sa visite, Berthe Schilizzi propose ainsi la présidence d'honneur de son œuvre de bienfaisance au maire de Rennes, Jean Janvier.


L'École primaire supérieure et professionnelle de filles, rue Jean-Macé

Archives au féminin en 1917

Accéder au document dans son intégralité

Le projet d'école primaire supérieure de jeunes filles s'inscrit dans la politique dynamique menée par le maire de Rennes Jean Janvier en faveur des classes populaires. Sa création s'impose "à une époque où la femme veut travailler et subvenir par elle-même aux nécessité de l'existence" (délibération du 15 décembre 1911). Il s'agit d'offrir aux jeunes filles de milieu modeste qui ne peuvent entrer au Lycée, la possibilité d'apprendre un métier.

C'est à l'architecte Emmanuel Le Ray que le maire confie le soin de moderniser l'ancienne Institution Saint-Vincent-de-Paul située rue Jean-Macé et confisquée par l'État après la loi de 1905. Malgré l'occupation de la majeure partie des bâtiments par un hôpital de guerre, l'école est ouverte le 1er octobre 1917 et inaugurée officiellement le 18 novembre suivant par Paul Lapie, directeur de l'Enseignement primaire au ministère de l'Instruction publique.

Dès son ouverture, le succès de cette école est très grand et ne cessera de croître, ce qui obligera la municipalité à augmenter régulièrement le personnel d'encadrement et d'enseignement de l'établissement, exclusivement féminin. En 1917, plus de 300 jeunes filles sont inscrites et le personnel se compose d'une directrice, une adjointe et 4 professeurs (2 de lettres et 2 de sciences). Après la création d'un internat en 1922, l'établissement compte, en 1927, 72 élèves en cours préparatoire et 315 élèves réparties en 8 classes dont 10 en classe de brevet supérieur.

Parallèlement, l'enseignement général (lettres, sciences, anglais) est progressivement complété par des cours d'éducation physique et d'enseignement moral et ménager (coupe, couture, repassage) puis de sections spéciales de commerce, de comptabilité et de sténodactylo.

En 1947, l'école est transformée en collège moderne et technique de jeunes filles puis devient lycée de jeunes filles dans les années 1960 et enfin lycée d'État mixte à partir de 1970.

Pour aller plus loin : Monique Folio, "Le lycée Jean-Macé de Rennes 1842-1990", mémoire de maîtrise en histoire de l'art sous la direction de Jean-Yves Andrieux, université Rennes 2, 2001, Tomes I et II, BIB R2-225


Louise Bodin et sa correspondance

Archives au féminin en 1919

Les documents produits par Louise Bodin (1877-1929), féministe, journaliste et militante politique, sont principalement de la correspondance qu'elle a échangée avec Romain Rolland, sa sœur Madeleine Rolland et avec Jules Lemaître, critique littéraire. Ils ont intégré les fonds des Archives de Rennes en 2006.

À l'exception d'une lettre rédigée par Louise Bodin, le fonds de la famille Bodin ne contient que des lettres reçues par Louise Bodin, ce qui est assez courant dans un échange de correspondance, l'auteur des lettres ne conservant pas systématiquement une copie de la lettre envoyée. En l'espèce, la pensée et l'action de Louise Bodin sont éclairées par des intellectuels aux convictions et aux vues convergentes, que sont Romain Rolland et sa sœur Madeleine Rolland.

En outre, ces lettres mettent assez bien en évidence le rôle de la correspondance entre intellectuels de l'époque. Elle permet d'échanger des informations sur la situation politique, économique et sociale à l'étranger : Romain Rolland reproduit à son intention un extrait d'une lettre de Stefan Zweig, qui relate que le physicien Albert Einstein est inquiété pour ses idées pacifistes au point de ne pouvoir continuer ses cours ; il rapporte dans une autre lettre la description effroyable que lui fait un ami suisse de la famine en Autriche après la guerre. De plus, les épistoliers s'entraident pour le relais et la diffusion de leurs idées respectives : Madeleine et Romain Rolland s'emploient à diffuser La voix des femmes ; Louise Bodin signe le manifeste de Romain Rolland La Déclaration de l'indépendance de l'esprit de juin 1919. Enfin, les transmissions de coordonnées visent la constitution de réseaux entre intellectuels partageant des convictions identiques ou proches, afin de constituer des groupes plus ou moins formalisés d'échanges d'idées et d'actions, de cercles de discussion à des organisations internationales.

Dans cette lettre, Romain Rolland remercie Louise Bodin de son adhésion à "son appel" : il s'agit très probablement de La Déclaration de l'indépendance de l'Esprit, qui est un manifeste rédigé par Romain Rolland et publié dans le quotidien L'Humanité du 26 juin 1919, dans lequel Rolland appelle les intellectuels (les « Travailleurs de l'Esprit »), qui ont été séparés par cinq années de conflit, à retrouver leur « union fraternelle » antérieure en tirant les leçons de la période qui vient de s'achever.


Premier groupe féminin de gymnastique au Cercle Paul-Bert

Archives au féminin en 1924

Accéder au document dans son intégralité

À Rennes, le Cercle Paul-Bert (CPB) fait figure de précurseur dans la pratique du sport féminin. C'est là que s'ouvre le premier groupe de gymnastique féminin en 1913 tandis que la première section

féminine du patronage de La Tour-d'Auvergne date de 1932 !

Après la Première Guerre mondiale, la pratique féminine est encouragée par les comités régionaux des fédérations féminines et le CPB ouvre une section féminine de football dès l'été 1920, suivi d'un groupe de basket et de natation.

Pour autant, la pratique féminine s'accompagne d'une grande prudence et le CPB décide de la constitution d'un comité de dames patronnesses pour que les jeunes filles soient "l'objet d'une surveillance sévère, suivie et les séances rigoureusement surveillées." La plus grande précaution est également réservée au costume porté par les sportives ou à l'organisation des entrainements et déplacements où la séparation garçons / filles est alors très stricte.

Pour faciliter cette séparation, la section féminine s'installe en 1927 rue d'Échange, au premier étage de l'ancienne école d'industrie et les filles inscrites au groupe de natation viennent accompagnées de leurs parents.

Pour aller plus loin, parcourez l'exposition virtuelle "The Great Attraction", réalisée par les 4 étudiantes de la promotion Grace Hopper du Master Humanités Numériques de l’Université de Rennes 2 en 2021-2022.


Des femmes dans la police municipale

Archives au féminin en 1924

Avant 1916, aucune femme n'apparait dans les effectifs de la police municipale. Un état nominatif du personnel de police datant de 1918 atteste de l'emploi de huit femmes au sein du service de police de Rennes entre 1916 et 1918 : six plantons, une secrétaire auxiliaire au bureau central et une secrétaire au bureau de la sûreté, chargée du classement des fiches des individus à rechercher. L'absence des hommes partis au front explique sans doute leur recrutement. Cependant, dès le 25 novembre 1918, le maire demande au commissaire central d'informer les femmes plantons de leur licenciement au 31 décembre. Seules mesdames Chevalier et Pinault, secrétaires aux bureaux central et de sûreté sont prolongées temporairement.

Cinq ans plus tard, la question de l'emploi des femmes dans la police est à l'ordre du jour du 6e Congrès international de l'Association pour la répression de la traite des femmes et des enfants qui doit se tenir en septembre 1925. Préparant ce congrès et désireux d'être le porte-parole fidèle des "autorités administratives et des magistrats municipaux", Monsieur Hennequin, président du Comité français de l'association écrit au maire de Rennes pour solliciter son avis sur cette question.

La réponse du maire se base sur un rapport du commissaire central de police, elle est édifiante.  

"La coopération féminine" est souhaitable pour "l'application des mesures administratives contre l'immoralité", notamment pour les visites sanitaires des prostituées. De même, "les qualités des femmes peuvent être encore utilisées", pour les questions relatives à l'hygiène, la surveillance ou les violences à l'égard des enfants ou des jeunes femmes mineures." Enfin, rien ne s'oppose à ce que les femmes travaillent dans les bureaux, "à la tenue du répertoire des fiches, archives, enregistrement des pièces de correspondance."

Par contre, il n'est pas question de permettre aux femmes de travailler sur la voie publique, à des postes de police criminelle ou répressive ou à la surveillance des prostitués ou du vagabondage, bref, à tous les postes qui nécessitent d'être vues et d'employer la force, "les services rendus [par les femmes] ne pouvant être que très inférieurs à ceux rendus par les agents hommes."


Des rameuses à la SRR dès les années 1920

Archives au féminin en 1925

C'est à la fin des années 1920 que la pratique féminine de l’aviron commence à Rennes. À Paris, les femmes sont organisées dès 1912 au sein de sociétés strictement féminines. Au sein de la Société des régates rennaises, elles sont depuis longtemps présentes comme épouses ou filles de sociétaires, aux matinées dansantes, comme barreuses occasionnelles et même comme secrétaires dès 1919.

Mais, alors que le Cercle Paul-Bert compte depuis 1913 une section féminine de gymnastique et depuis 1926 un groupe féminin de natation, ce n’est qu’aux régates de Rennes du 18 mai 1930 que des rameuses sont engagées dans une course : il s’agit d’étudiantes de la faculté de lettres. Le 28 juin 1931, aux régates de Laval  auxquelles a été convié un club  parisien, c’est l’équipe féminine de Rennes, manifestement la seule existante dans l’Ouest, qui est invitée pour affronter, en yole à 4, sur 600 mètres, une équipe du club parisien Fémina-Sport, qu’elle laisse loin derrière.

Pour en savoir plus, consultez le livret de l'exposition "Rame, rameurs, ramez : la Société des régates rennaises, 1867-2017"


Délibération relative aux femmes en couches

Archives au féminin en 1928

La protection des nourrissons ne peut se faire sans une protection des mères. C'est l'objet de la loi d'assistance aux femmes en couches de 1913, qui met notamment en place le repos des femmes enceintes, et une allocation journalière pour les femmes enceintes salariées, privées de ressources du fait du repos.  Les femmes doivent s'inscrire auprès du bureau de bienfaisance. La liste des personnes à admettre au titre de l'assistance aux femmes en couches est étudiée en conseil municipal. Les bénéficiaires sont contrôlées par le bureau de bienfaisance, qui veille au respect du repos effectif et des soins d'hygiène apportés au nourrisson.

Pour en savoir plus, parcourez l'exposition virtuelle "Cinq siècles d'histoire sociale à Rennes."


Mobilisation des receveuses et conductrices de tramways

Archives au féminin en 1928

Cette pétition témoigne du combat difficile mené par les femmes pour leurs droits dans le monde professionnel. Les 40 signataires "protestent contre le vote du Conseil supérieur du travail, qui, dans sa séance du 25 novembre 1927, s'est prononcé pour l'interdiction des femmes comme receveuses ou conductrices dans les tramways et autobus." Elles demandent donc au maire de Rennes d'intercéder pour elles auprès du ministre du Travail, afin qu'elles ne soient pas brutalement privées leur moyen d'existence, du bénéfice de leur ancienneté et de leurs droits à la retraite.

Ce qui est intéressant, c'est qu'elles utilisent l'argument très masculin de leur faiblesse physique pour faire valoir leur aptitude à exercer ces fonctions : "les fonctions de receveuse ou même de conductrice n'exigent pas le déploiement d'efforts physiques au-dessus des forces normales d'une femme." Elles avancent en outre que ce travail est moins pénible que "dans certaines industries privées", que l'emploi des femmes dans les exploitations de tramways n'a jamais donné lieu à aucune critique de la part des usagers" et, qu'enfin, si les femmes peuvent conduire des automobiles, il parait logique de les laisser conduire aussi des tramways !


La figure de l'infirmière

Archives au féminin en 1935

Associée au combat contre la maladie et la mort, la figure de l'infirmière émerge surtout au XXe siècle avec la Grande Guerre et l'image des infirmières de la Croix-Rouge pansant les blessés à l'arrière du front. Elle est même érigée en symbole de la guérison, protégeant les enfants de la maladie, lors de campagnes de lutte antituberculeuse de l'Entre-deux-guerres.

La sage-femme a longtemps été une profession exclusivement féminine. Il faut attendre 1982 pour que la profession soit ouverte aux hommes. Une directive européenne interdit alors la discrimination sexuelle et contraint donc les États membres à ouvrir cette profession aux hommes.


Marie et Simone Alizon, résistantes rennaises

Archives au féminin de 1939 à 1945

La mémoire de la Seconde Guerre mondiale s'inscrit dans les villes à travers la dénomination des rues, voies et places. Dès 1953, la municipalité d'Yves Milon, maire de Rennes et ancien résistant, vote la dénomination de voies aux noms de résistant.e.s rennais.e.s. Parmi elles, la rue Marie-Alizon voit le jour.

Née à Rennes en 1921, Marie Alizon travaille, dès l'obtention de son brevet élémentaire, dans l'hôtel familial près de la gare de Rennes. En octobre 1941, Marie et sa sœur Simone entrent en contact avec le réseau Johnny qui opère en Bretagne depuis le mois de mars et est chargé de recueillir des renseignements militaires, plus particulièrement portuaires et maritimes, sur les installations, les mouvements des navires et sous-marins allemands stationnés à Brest. Leur tâche consiste à recevoir ces renseignements codés et à les transmettre aux radios du réseau qui radiotélégraphent à Londres.

Arrêtées en mars 1942, elles sont, dans un premier temps, incarcérées à Rennes puis à la prison de la Santé à Paris. Déportées au camp d'Auschwitz, Marie y meurt le 23 janvier 1943. En 2019, la rue Simone-Alizon est rebaptisée rue Marie-et-Simone-Alizon.

Marcel Brossier, Honoré Commeurec, Françoise Elie... Plus de cent-quarante voies ou places de la ville de Rennes portent aujourd'hui le nom de figures de la résistance locale ou nationale.

Pour en savoir plus sur le réseau Johnny, consultez l'ouvrage d’Emmanuel Couanault, "Des agents ordinaires, Le Réseau "Johnny" 1940-1943", Locus Solus éditions, 2016.


Mesdames Martineau et Lambart demandent l'attribution d'un jardin pour subvenir aux besoins de leurs familles

Archives au féminin en 1941

Lors de la séance du conseil municipal du 7 février 1940, le maire de Rennes, François Château, propose que la Ville mette à disposition des Rennais, des parcelles de terrains communaux libres pour les transformer en jardins. Il s'agit d'une mesure provisoire et exceptionnelle qui vise à remédier partiellement aux difficultés de ravitaillement par la culture de légumes et à aider les familles nombreuses.

Plusieurs terrains communaux acquis par la Ville pour des projets de construction (écoles, lavoir, champ de course) sont alors recensés pour la réalisation de 130 lots sur plus de 27 000 m2. Ces lots sont mis à disposition progressivement.

Le samedi 8 février 1941, la municipalité de Rennes fait ainsi paraitre dans la presse, un petit encart pour informer les Rennais que "l'Administration municipale dispose de 30 Lots de terrain de chacun 200 mètres carrés environ, rue du Champ de la Justice, à mettre gratuitement à la disposition des personnes qui en feront la demande, pour culture de légumes."

Mesdames Martineau et Lambart, dont les maris sont prisonniers en Allemagne, habitent route de Lorient, tout près de ces terrains. Les deux sœurs, qui ont à leur charge 3 enfants en bas âges, écrivent en mairie dès le lundi suivant et se verront attribuer le lot n°17 le 20 février suivant.

Une note conservée dans le dossier 1703 W 36 indique qu'au 1er janvier 1943, le nombre de jardins ouvriers à Rennes s'élèvent à 211 sur une surface cultivée de 46 000 m2.


La citoyenne et l'élue

Archives au féminin de 1941 à 1944

La femme est longtemps restée exclue de la vie politique à la fois en tant qu'élue et en tant que citoyenne. Malgré une volonté de l'Assemblée nationale de leur accorder le droit de vote à plusieurs reprises au début du XXe siècle, elles n'ont obtenu ce droit qu'en 1944, date à laquelle elles sont devenues également éligibles.

À Rennes, la première femme au sein du conseil municipal se nomme Madame Laurent, présidente de l'œuvre Grancher, chargée des œuvres privées d'assistance et de bienfaisance nationale. Les conseillères municipales de l'époque devaient selon les ordres du préfet, se préoccuper essentiellement des questions sociales et familiales.


Figures féminines au service de la propagande

Archives au féminin en 1942

Cette affiche, produite et diffusée par les offices de placement pour le travail en Allemagne à partir de l'été 1942, incite les femmes françaises à envoyer leurs fils, maris ou fiancés, travailler en Allemagne. Le texte use d'un style direct. En chaque début de paragraphe, un "vous" introductif se détache en capitales pour persuader les femmes et les inciter à faire de même auprès des hommes de leur famille. Les femmes, cantonnées à leurs rôles de mères de famille, maîtresses de maison ou fiancées sont instrumentalisées au profit de la propagande nationaliste du régime de Vichy.

Cette affiche fait suite au discours radiophonique de Pierre Laval du 22 juin 1942, dans lequel il exprime son désir d’une victoire finale de l’Allemagne afin de contrer la montée du bolchévisme et vante le système de la Relève. Celui-ci consiste à envoyer dans l'industrie allemande de la main-d'œuvre qualifiée recrutée dans les pays occupés. En échange de cette main-d'œuvre, des prisonniers de guerre français sont libérés. Le ratio : un prisonnier de guerre renvoyé chez lui pour trois ouvriers spécialisés envoyés en Allemagne.

Malgré une large propagande, la Relève n'aura que peu de succès. Bientôt, c'est le Service du travail obligatoire (STO) qui imposera cette main-d'œuvre.


Les femmes ont le droit de vote

Archives au féminin en 1945

Appelées aux urnes pour la première fois, les femmes ont largement contribué au succès de la liste républicaine, affirmant leur attachement clairvoyant aux institutions démocratiques et laïques”. Voici comment la liste Antifasciste de la Démocratie et de la Résistance, victorieuse aux élections municipales de Rennes en 1945, parle de ses électrices. Il s'agit alors du premier scrutin pour lequel les femmes peuvent voter !

La participation des femmes y est massive, presque comparable à celle des hommes. De nombreux clichés, publiés dans la presse, rendent cette participation concrète aux yeux de tous, tout en l'immortalisant.

Depuis la fin du 18e siècle, les femmes expriment leur volonté de participer à la vie citoyenne. C’est donc de haute lutte qu’elles obtiennent le droit de voter mais aussi d’être élue ! À Rennes, la première femme au sein du conseil municipal se nomme Madame Laurent, présidente de l'œuvre Grancher, chargée des œuvres privées d'assistance et de bienfaisance nationale. Les conseillères municipales de l'époque devaient selon les ordres du préfet, se préoccuper essentiellement des questions sociales et familiales.

A l'approche de la Libération, le droit de vote des femmes n'est pas une priorité. Néanmoins, les choses s'accélèrent le 18 mars 1945, avec la déclaration du général de Gaulle devant l'Assemblée consultative provisoire : "le régime nouveau doit comporter une représentation élue par tous les hommes et toutes les femmes de chez nous." Le 25 mars, l'amendement Fernand Grenier instaurant le vote des femmes est adopté à 51 voix contre 16. Moins d'un mois plus tard, le 21 avril, l'article 17 de l'ordonnance du Comité français de la Libération nationale portant sur l’organisation des pouvoirs publics en France après la Libération précise que "les femmes sont électrices et éligibles dans les mêmes conditions que les hommes", disposition confirmée le 5 octobre par le Gouvernement provisoire de la République française.

En 1946, une nouvelle étape est franchie : le principe d’égalité des droits entre les hommes et les femmes est officialisé dans le préambule de la Constitution de la IVe République.


Témoignage d'une femme après le bombardement de mars 1943

Archives au féminin en 1943

Cette lettre fait partie d'un ensemble de quatre lettres (1943-1944) qui évoque plusieurs aspects de l’histoire d’une famille rennaise durant la guerre. Dans cette lettre destinée à sa grand-mère, une femme en activité évoque le bombardement de mars 1943, qui a détruit le quartier de la gare, dont le magasin de sa sœur. L’usage des bombes incendiaires installe une peur constante dans la famille. Le danger a contraint l’autrice à se réfugier à 16 km de Rennes puis, en 1944, à 28 km : les allers-retours quotidiens la fatiguent. La circulation est difficile, le ravitaillement se fait mal : la lassitude est palpable.

Pour en savoir plus, parcourez le dossier pédagogique "Rennes dans la Deuxième Guerre mondiale"


Yvette et Jeanne Denieul ouvrent "Les nourritures terrestres"

Archives au féminin en 1947

En 1947, après avoir appris le métier à "la maison des amis des livres" auprès de la célèbre libraire Adrienne Monnier, 7 rue de l’Odéon à Paris, Yvette Denieul décide d'ouvrir, avec sa sœur Jeanne, une petite librairie à Rennes, au n° 19 de la rue Hoche.

Courageuses et aventurières, les deux sœurs donnent à leur boutique le nom du roman d'André Gide "Les nourritures terrestres". Elles l'évoquent dans un article du Ouest-France daté du 5 janvier 1987 : " A l'origine, notre enseigne choquait : Gide "L'immoraliste" était proche du parti communiste. On nous traitait même d'existentialistes … Nous étions jeunes, ça ne nous gênait pas de choquer."

Jusqu'en 1988, Jeanne et Yvette, accompagnée de son mari Yves Bertho, ont transmis à des générations de Rennais et Rennaises leur passion de la lecture, de l'art et de la littérature. Pendant 40 ans, leurs personnalités tout autant que leurs choix personnels et audacieux ont fait de ce local de moins de 60m2 un rendez-vous incontournable des écrivains, étudiants, intellectuels, curieux ou férus de littérature. Répondant aux marchés de fournitures de la Ville de Rennes, la librairie devient aussi tout naturellement un partenaire incontournable de la bibliothèque municipale de la Ville, comme en atteste le document ci-joint.

Beaucoup de Rennais et de Rennaises se souviennent encore avec nostalgie de cette adresse devenue une véritable institution dans le centre-ville. Elle ne survivra cependant pas longtemps au départ en retraite du trio. Après deux reprises, en 1988 par Pierre Commeine puis en 1991 par Françoise Guichenay, la librairie a fermé ses portes. La librairie Critic, spécialisée dans la bande-dessinée, est aujourd'hui installée au même endroit.

Pour en savoir plus sur la librairie "Les Nourritures terrestres" et ses fondatrices, regardez ce reportage de l'Ina, et sur le parcours exceptionnel d'Adrienne Monnier, lisez cet article du webzine Unidivers.


L'UFCS : rendre les femmes actrices de leur vie personnelle et sociale

Archives au féminin en 1957

Diplômée de l'enseignement supérieur, Anne Cogné s'engage très tôt dans le monde associatif pour défendre le droit des femmes. Membre de Vie Nouvelle, elle rejoint l'Union féminine civique et sociale (UFCS) puis préside le Centre d'information des droits des femmes (CIDF). Elle est membre de l'équipe municipale d’Edmond Hervé de 1983 à 1995 et devient, en 1989, adjointe au maire déléguée aux droits des femmes. Elle a fait don des archives de l'UFCS à la Ville de Rennes en 2012.

L'UFCS est créée en 1925 au plan national avec pour objet la revendication du droit de vote pour les femmes et la défense des femmes salariées. Depuis sa création, l'action de l'UFCS s'est diversifiée tout en restant axée sur la "promotion des femmes" : vie personnelle, familiale, professionnelle, civique et sociale.

Une section locale est créée à Rennes en 1957 et semble perdurer jusqu'en 1992, année de la dernière estimation du nombre d'adhérentes. Dans cet intervalle, l'UFCS a comme ligne directrice la défense des droits des femmes. Son projet est de faire évoluer les mentalités en y insufflant un esprit civique appliqué aux domaines de la consommation, de la citoyenneté, du travail, du transport ou du logement, et ainsi de contribuer à la construction d'une société plus humaine, où chacun a sa chance. Son action est marquée par la formation des candidates aux élections municipales ainsi que l'application de la loi sur la parité.

Concrètement, l'UFCS suscite et anime des actions collectives avec des organismes publics et privés. Les adhérentes se forment à l'UFCS par le biais de réunions, cercles, commissions de travail, stages, cycles de formation et des publications de l'association comme Dialoguer et Les cahiers d'éducation civique. Chaque adhérente doit pouvoir appréhender les mécanismes politiques, économiques, sociaux et politiques afin d'être en mesure de prendre sa place dans la société, d'exercer ses droits et ses responsabilités.


Naissance du Planning familial à Rennes

Archives au féminin en 1960

Accéder au document dans son intégralité

C'est au milieu des années 1950 que les contestations aux lois de 1920 et 1923 contre l'avortement et la contraception s'organisent autour de l'association " La Maternité Heureuse", créée à l'initiative de la gynécologue Marie-Andrée Lagroua Weill-Hallé et de la sociologue Evelyne Sullerot. L'association devient, en 1960 le Mouvement Français pour le Planning Familial (MFPF).

Après les départements du Finistère, du Morbihan, de la Loire-Atlantique et des Côtes-d'Armor, une permanence d'Ille-et-Vilaine du Planning familial est créée à Rennes en 1965, à l'initiative de l'administrateur de la Caisse régionale d'assurance maladie arrivé de Paris, libre-penseur, socialiste et franc-maçon, André Cahn. Les locaux du syndicat Force ouvrière, situés 20 boulevard Magenta, abritent alors les permanences du MFPF qui compte 300 adhérents dès sa création !

L'association se développe rapidement, comme en atteste ce courrier d'André Cahn de 1974, qui demande à la Ville la mise à disposition de nouveaux locaux plus grands et plus centraux. Mouvement d'éducation populaire, le MFPF propose des permanences d'information et de délivrance de contraception qui nécessitent des locaux adaptés pour l'accueil et l'attente des publics, ainsi que pour la formation des travailleurs sociaux.

Pour aller plus loin : Lydie Porée, Contraception, avortement : les mobilisations à Rennes pour la liberté de procréer. Histoire et mémoire des groupes locaux du planning familial, de choisir et MLAC (1965-1975), master de recherche sous la direction de Christine Bard, 2013, R2-487.


L'Association des femmes "chefs de famille" de Rennes

Archives au féminin en 1969

Accéder au document dans son intégralité

Dès le début des années 1960, des femmes seules ayant un enfant ou une personne à charge, veuves, séparées, divorcées, abandonnées ou mères célibataires, se mobilisent au sein de la confédération syndicale des familles en faveur d’une meilleure reconnaissance de leurs situations familiales et de leurs droits. Sans mari, elles se définissent comme "chefs de famille". C'est dans ce contexte que l'Association des femmes chefs de famille (Afcf) est créée à Rennes en 1969.

Dans ses statuts présentés ici, les objectifs de l'association sont "d'exprimer l'existence sociale des femmes chefs de famille […] ; de permettre aux femmes chefs de famille d'être représentées et de faire valoir leurs droits auprès des pouvoirs publics et des organismes semi-publics ou privés ; de promouvoir des services et des réalisations sociales répondant aux intérêts de cette catégorie sociale ; d'obtenir des pouvoirs publics qu'ils tiennent compte des femmes chefs de famille dans l'élaboration ou l'aménagement de toute la législation."

Dans les années 1970, l'association porte le projet d'une résidence pour les femmes chefs de famille composée d'un hôtel maternel et de logements pour les femmes ayant un ou plusieurs enfants à charge. Cette résidence doit permettre de loger des femmes sans domicile, dans une période de formation professionnelle, à la sortie de la maison maternelle, désirant, tout en travaillant, continuer à s'occuper de leurs enfants à la suite d'une séparation. Elle a aussi vocation à protéger femme et enfant(s) d'une situation dangereuse avec le mari, dans l'attente d'une procédure, sans que cet hébergement ne puisse être considéré comme un abandon du domicile conjugal.

En 1977, cette équipe de bénévoles obtient l’agrément pour la création d’un Centre d’hébergement et de réadaptation sociale (Chrs) de 140 places destiné à protéger, héberger, réinsérer des femmes avec enfants sans limite d’âge, confrontées aux difficultés conjugales, avec ouverture 24 heures sur 24. Suit une période de fort développement de services complémentaires pris en charge par des salariés professionnels.

En 1983 l’Afcf disparaît au profit d’une nouvelle association s’intitulant Association pour les familles en difficultés (Asfad), dont les statuts permettent d’accueillir aussi bien des femmes que des hommes avec enfants ou des familles en reconstitution de couple. En 2001, elle choisit une nouvelle appellation : "Association pour l’action sociale et la formation à l’autonomie et au devenir" qui existe toujours aujourd'hui : https://www.asfad.fr/

Pour en savoir plus : Fiona Friedli, "Redéfinir la famille pour en faire partie. Les mobilisations des Femmes Chefs de famille (France, 1963-1982), in : Genre & Histoire , n°16,  2015.


La section Choisir-Rennes lutte pour la dépénalisation de l'avortement

Archives au féminin en 1973

Les Archives de Rennes disposent d'une importante documentation sur la section Choisir-Rennes, donnée par Patrick Wiener. En 1973, il est étudiant en troisième année de médecine à la faculté de Rennes et devient membre de la section rennaise de l'association Choisir qui lutte pour la dépénalisation de l'avortement. Installée au 13 rue Saint-Michel, la section Choisir-Rennes compte entre 20 et 30 membres tous âgés d'une vingtaine d'années.

L'association lutte sur plusieurs fronts. Elle revendique la liberté d'avorter et de contraception et demande une prise en charge matérielle et financière par l'État. Mais ce qui fait la particularité de la section rennaise, c'est que contrairement à l'association nationale de Gisèle Halimi qui veut rester dans le champ de la légalité, elle se lance très vite dans la pratique des avortements militants et illégaux.

À Rennes, deux solutions s'offrent aux femmes désireuses d'avorter. Celles qui n'ont pas de moyens financiers sont prises en charge par l'association. Celles qui ont plus de huit semaines de grossesse et disposent de moyens financiers sont accompagnées par Choisir-Rennes au moyen d'informations pour aller avorter à l'étranger.

En avril 1973, Choisir-Rennes se désolidarise de Choisir national mais petit à petit le mouvement s'essouffle. La section va alors travailler avec le mouvement pour la liberté de l'avortement et de la contraception (MLAC) pour continuer la lutte. Celui-ci est dissout suite à la dépénalisation de l'avortement en janvier 1975. Un centre d'orthogénie à l'Hôtel-Dieu de Rennes est créé dans les années 1975-1976.


Henri Fréville et le projet de loi relatif à l'IVG

Archives au féminin en 1974

Accéder au document dans son intégralité

Le 16 décembre 1974, Henri Fréville, sénateur et maire de Rennes, transmet à la municipalité le texte de son intervention prononcée au Sénat trois jours plus tôt, sur le projet de loi relatif à l'interruption volontaire de grossesse. Il souhaite ainsi faire part aux élus "sans obscurité ni réticence" de la manière dont il a perçu le projet, à la veille de "prendre une décision fondamentale dont les effets marqueront, à coup sûr, l'histoire sociale de notre pays."

Il s'agit d'une analyse où il souligne les points essentiels, le réalisme et la modernité de ce projet de loi. Même si l'avortement lui "apparait comme un contact d'échec", il en appelle à la responsabilité des élus et considère que ce projet de loi constitue un progrès, "visant à mettre fin, à l'exploitation […] de la détresse féminine."

Le texte se termine sur quelques lignes touchantes adressées directement à Simone Veil, ministre de la Santé. Henri Fréville rend hommage à son engagement dans "ce grand combat dont chacun est témoin" et exprime sans détour son soutien au projet, sans cacher cependant le cas de conscience personnel que ce choix a représenté pour lui.


Les ouvrières de la SPLI en lutte pour sauver leurs emplois

Archives au féminin en 1978

Ces documents témoignent de la lutte des ouvrières de la Société parisienne de lingerie indémaillable (SPLI) qui lèvent la tête et le poing, à la fin des années 1970, pour la défense de leurs droits et de leurs emplois. Thierry Loriol, ouvrier et délégué du personnel de la SPLI participe alors activement aux manifestations et à l'occupation de l'usine lorsqu'est annoncée sa liquidation en juin 1978. Il a donné à la Ville de Rennes entre 2016 et 2018 une partie des documents retraçant l'histoire de ce mouvement social. Ils sont conservés sous la cote 58 Z.

Ces archives variées (photographies, montages audiovisuels, affiches, tracts, diapositives…) complètent les documents donnés par l'association Histoire du féminisme à Rennes (10 Z 288). Elles témoignent de la façon dont ces femmes, courbées sur leurs machines à coudre mais aussi dans la société, se sont organisées pour entrer en lutte. Leur combat n'a malheureusement pas été couronné de succès mais a permis, pour beaucoup d'entre elles, d'agir, de s'exprimer, de manifester, d'exister, de prendre des décisions individuelles et collectives. 

Pour en savoir plus, consultez la galerie de documents dédiée à SPLI


Ghislaine Mesnage, syndicaliste CFDT à Mammouth

Archives au féminin en 1979

Ghislaine Mesnage a fait don des archives liées à ses activités professionnelles et syndicales aux Archives de Rennes en 2019. Elle entre comme caissière à Mammouth en 1973 et, dès le mois suivant, intègre la Confédération française démocratique du travail (CFDT). Elle y reste jusqu'en 1985 et participe aux mouvements de grève des années 1970.

Au sein de la CFDT, Ghislaine Mesnage fait partie de la branche Commerces services dont certains documents illustrent ici les réflexions et les actions en faveurs des femmes. Il est intéressant de suivre, à travers les tracts, questionnaires et comptes rendus comment "le problème des travailleuses" est pris en compte dans les années 1970. Cet article paru dans Le Maillon est une bonne illustration des questionnements des membres de la CFDT et de leur volonté d'agir.

Pour contribuer à une meilleure répartition du travail et des rôles entre les hommes et les femmes dans l'entreprise et favoriser la libération des femmes, la CFDT met également en place des commissions (commission femmes dès 1974, commission départementale Travailleuses de la CFDT PTT à partir de 1978), qui prennent en compte des sujets très concrets impactant leurs droits et leurs conditions de vie et de travail : garde des enfants et horaires, travail domestique, interruption volontaire de grossesse, contraception, promotions, salaires, affectations, pénibilité, temps partiels, nocturnes...


"Les Marjolaines", un groupe de femmes en recherche d'emploi

Archives au féminin de 1984 à 1985

Ce document manuscrit a été rédigé et donné aux Archives de Rennes par Lucienne Mazurais, habitante du Blosne depuis 1971.

Entre le boulevard de Yougoslavie et la rue de Hongrie, une baraque est installée par la SEMAEB dès le début du chantier de la ZUP Sud pour accueillir les réunions des chefs de chantier et des architectes-aménageurs. Dans les années 1980, à deux pas du tout nouvel équipement culturel Le Triangle, elle devient un local associatif pour les jeunes du quartier et pour "les Marjolaines", groupe de femmes en recherche d'emploi.

Parmi elles, Lucienne Mazurais explique dans ce document les débuts de cette aventure collective : "Une dizaine de femmes au chômage habitant la ZUP Sud se regroupèrent grâce à un animateur du Triangle et des travailleur(es) sociaux de la CAF […] pour sortir de cette impasse noire qu'est le chômage." Grâce à un local et au téléphone, ces femmes se prennent en main, se soutiennent et obtiennent de petits boulots (ménages, repas, couture…).

Lieu d'émancipation et de solidarité, le groupe "les Marjolaines" se constitue en association l'année suivante et s'installe dans les locaux de l'association des travailleurs chômeurs solidaires (ATCS) aujourd'hui disparue.

En janvier 2020, la baraque du Blosne a été détruite pour laisser place au nouveau pôle associatif du quartier.


Une enquête sur l'encadrement féminin au sein de la Ville de Rennes

Archives au féminin en 1991

En 1991, la Ville de Rennes confie au CERAF (Centre d'Etudes, Recherche – Action sur l'emploi et la formation des Femmes) une étude dont l'objectif est d'expliquer l'écart entre la féminisation des emplois territoriaux et la sous-représentation des femmes dans l'encadrement. Anne Cogné, conseillère municipale chargée de la vie socio-culturelle, déclare lors de la séance du conseil municipal de Rennes du 4 novembre 1991 : "La ville de Rennes soucieuse de donner aux femmes la place qui leur revient a décidé d'engager au sein de sa propre administration un processus de recherche-action, afin d'analyser les facteurs explicatifs de cette situation et de définir les actions susceptibles d'infléchir les tendances observées."

C'est Annie Junter-Loiseau qui réalise cette étude. À l'époque, 68 femmes sont cadres A à la Ville de Rennes sur 131 hommes. Largement majoritaires dans les catégories B et C, elles sont minoritaires dans la catégorie A qui regroupe les attaché.e.s, ingénieur.e.s, directeur.trices..

Se nourrissant de données statistiques et d'entretiens individuels, cette étude est un document précieux pour cerner "les caractéristiques, les comportements et représentations attachés au fait d'être femme et cadre à la ville de Rennes à la fin XXe siècle." Elle est librement consultable en salle de lecture des Archives de rennes sous la cote R2-491.


L'engagement progressif des collectivités

Archives au féminin en 1999

Au cours des années 1970, marquées par le vote de la loi Veil du 17 janvier 1975 autorisant l'IVG,  la question de la "condition féminine" est très présente dans le débat politique. Janine Pichon devient la première déléguée régionale et départementale à la condition féminine, plusieurs groupes de femmes voient le jour dans les quartiers de la ville et le Centre rennais d'information des femmes (CRIF) ouvre ses portes à Rennes en octobre 1979. Dans ce contexte, le socialiste Edmond Hervé est élu maire en 1977.

Anne Cogné, militante de l’Union féminine civique et sociale (UFCS) et présidente du CRIF en 1981 est conseillère municipale de 1983 à 1995. Elle est à l’origine de la création d’une délégation aux droits des femmes à la Ville de Rennes, toujours existante aujourd'hui.

En 1995, Maria Vadillo, conseillère déléguée à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes lance, pour la durée du mandat, un comité consultatif "Femmes et Cité" chargé de proposer des actions "pour améliorer les conditions de vie des femmes et augmenter leur participation à la vie publique".

Depuis la loi n° 2014-73 du 4 août 2014, portant sur l’égalité réelle entre les femmes et les hommes suivie du décret n°2015-761 du 24 juin 2015, un rapport annuel présente la mise en œuvre des engagements des trois collectivités Rennes Métropole, Ville de Rennes et CCAS sur cette politique publique.

Pour en savoir plus : Archives de Rennes. 57 Z (ancienne cote 10 Z 217), fonds de l'UFCS. Lisez également l'article de Lydie Porée sur les mobilisations féministes pendant les années 1970 à Rennes.


Aurélie Nemours et "L'alignement du XXIe siècle"

Archives au féminin en 2001

"L'alignement du XXIe siècle" est une œuvre d'art monumentale réalisée par la peintre et poétesse Aurélie Nemours, artiste majeure du courant abstrait et de la tendance de l'art construit, dont la période d'activité court sur la deuxième moitié du XXe siècle.  Cette œuvre est l'expression monumentale et en trois dimensions des réflexions et expérimentations de l'artiste, amorcée dans les années 1970 autour de la forme géométrique et du rythme.

À la fin des années 1990, le Musée des Beaux-Arts de Rennes consacre une rétrospective à l'œuvre d’Aurélie Nemours. Dans la foulée, la municipalité rennaise, sous l'impulsion de l'élu délégué à la culture Martial Gabillard, sollicite l'artiste pour la réalisation de l'œuvre monumentale. En mars 2004, le conseil municipal vote sa réalisation à l'unanimité et inscrit le projet au sein de son programme de commande publique, avec le soutien financier de l'État, de collectivités territoriales et de nombreux mécènes. Aurélie Nemours suit toutes les étapes de la réalisation de son œuvre mais décède en 2005, peu avant son inauguration en juin 2006.

Au cœur du parc de Beauregard, partez à la découverte des 72 colonnes de granit breton, aux dimensions et à l'alignement parfaitement réguliers qui s'érigent sur les hauteurs de Rennes !


Jacqueline Lagoutte, passeuse de mémoire

Archives au féminin en 2013

A l'occasion de l'exposition "Quand le commerce se raconte" en 2013, les Archives de Rennes ont mené une collecte de témoignages de commerçants rennais, dont celui de Jacqueline Lagoutte, fille de commerçants en gros.

Son témoignage précieux raconte l'histoire de ses parents qui achètent un fonds de commerce rue Thiers dans les années 1930 pour ouvrir un commerce de produits alimentaires en gros. Avant la guerre, l'entreprise familiale se porte bien et les livraisons à cheval puis en camionnettes ont lieu plusieurs fois par jour. Ils approvisionnent alors plusieurs centaines d'épiceries, cafés et boulangeries de quartier en produits alimentaires peu périssables (riz, café, sucre, sel, farine, vinaigre, huile, confiture, bonbons) ! L'entreprise prospérant, les Lagoutte achètent un nouvel entrepôt et s'installent rue Chicogné.

Jacqueline Lagoutte relate aussi les années de guerre et l'organisation de la distribution des denrées en échanges des tickets de rationnement. Après la guerre, l'avènement de Prisunic, des premières grandes surfaces et des groupements d'achat va engendrer la fermeture progressive des petits commerces. Le couple Lagoutte est contraint de fermer son commerce et de vendre sa clientèle en 1960.

Le témoignage complet de Jacqueline Lagoutte est conservé aux Archives de Rennes, sous la cote 10 Z 211. Un montage d'extraits de ce témoignage et de documents d'archives a été réalisé pour l'exposition est disponible en ligne, en cliquant ici.


Des noms de femmes pour les rues de Rennes

Archives au féminin en 2015

En France, il y a en moyenne 6 % des rues qui portent des patronymes féminins.

Le mouvement #MeToo en 2017 a accéléré la dynamique, avec des politiques publiques qui font preuve d'un volontarisme affiché dans la féminisation des noms de voies (odonymes) et de lieux (toponymes). L'objectif de cette démarche est de sensibiliser les citoyens et citoyennes dans leur expérience urbaine quotidienne.

À Rennes, c'est dans les années 2000 que la Ville fait ce constat alarmant: moins de 10 % des voies et équipements dans la ville, portant des noms de personnes, rendent hommage à des femmes. Ainsi, tous les ans, depuis 2015, la collectivité s’engage à prioriser des noms de femmes, afin de rétablir un équilibre essentiel. Ces choix, qui peuvent sembler anodins, améliorent ainsi la visibilité des femmes dans l’histoire de la ville et établissent progressivement une égalité traversant les époques, entre les femmes et les hommes !

Flavie Boukhenoufa, adjointe déléguée aux Relations internationales, aux relations publiques, aux cultes et à la laïcité s'exprime ainsi sur cette question en 2022 : " Tant de parcours de femmes rennaises, bretonnes, françaises ou étrangères sont d’exemplarité et méritent une visibilité auprès des citoyennes et citoyens qui vivent ou traversent notre ville."

Cette même année, sur les 1923 rues rennaises dénommées, 1158 portent le nom d'une personnalité décédée qui a marqué son époque. On y décompte 960 noms d'hommes pour 198 noms de femmes, soit un rapport de 83 % - 17 %. En sachant que tous les ans, ce sont une dizaine de nouvelles rues qui sont dénommées, c'est un chantier au long cours !

Accédez à la liste actualisée des noms de femmes attribués aux voies et équipements de la ville de Rennes : https://www.wiki-rennes.fr/Cat%C3%A9gorie:Matrimoine


Le plan d'action égalité femmes - hommes de Rennes Métropole

Archives au féminin en 2016

La loi du 4 août 2014 "pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes" impose aux villes de plus de 20 000 habitants de mettre en œuvre une politique pour l'égalité entre les femmes et les hommes selon une approche intégrée, mais aussi de veiller à l'évaluation de l'ensemble de leurs actions. Son objectif est de "réduire l'écart constaté entre l'égalité formelle et l'égalité réelle", que ce soit dans les sphères privée, professionnelle ou publique.

La ville de Rennes adopte, dès 2013, un plan d'actions pour l'égalité entre les femmes et les hommes, portant six principes forts : la reconnaissance de l'égalité entre les femmes et les hommes comme un droit fondamental ; la prise en compte des discriminations multiples et leur caractère cumulatif ; l'assurance d'une participation équilibrée des femmes et des hommes à la prise de décision ; l'élimination des stéréotypes sexués ; l'intégration de l'égalité entre les femmes et les hommes dans tous les engagements de la collectivité ; l'attribution des moyens indispensables à la mise en œuvre de ces principes.

La Ville de Rennes s'engage à travailler avec les partenaires politiques, institutionnels, associatifs et syndicaux et à décliner cette politique dans l’ensemble de ses politiques publiques et dans le fonctionnement de son administration. Ce plan d'actions fait l'objet d'un bilan dressé de façon annuelle depuis 2016.

Le 1er juin 2015, un comité consultatif pour l'égalité entre les femmes et les hommes est créé. Il est composé d'une quarantaine et membres et a pour vocation d'accompagner et de questionner la politique d'égalité entre les femmes et les hommes portée par la Ville de Rennes. C'est une instance de veille, de vigilance, de partage et d'impulsion.

En 2018, le label Afnor qui distingue les bonnes pratiques sur l’égalité professionnelle (créé en 2004) est renouvelé pour la Ville.

En 2022, Rennes métropole, la Ville de Rennes et dix autres communes s'engagent à agir ensemble pour plus d'égalité entre les femmes et les hommes dans la vie locale. Pour marquer cet engagement, les communes signent une charte établie par le Conseil des communes et régions d'Europe (CCRE).

Pour en savoir plus, parcourez la page sur l'égalité entre les femmes et les hommes sur le site de Rennes métropole.


Afficher la frise
haut de page